17 octobre 2024

Une lettre ouverte à notre secteur

À l’attention des présidences et directions générales, 

Je vous écris aujourd’hui, à vous et à vos communautés collégiales, à plusieurs égards : vous faire part de nos inquiétudes quant à l’impact des récentes réformes fédérales sur vos collectivités; me faire l’écho de votre exaspération à l’égard d’Ottawa; mobiliser notre secteur autour de ce qui est maintenant en danger.

Oui, vos préoccupations sont légitimes. L’approche unique d’Ottawa en matière de développement de la main-d’œuvre nationale ne tient pas compte des besoins de vos communautés. Elle jette le doute sur la qualité des collèges publics, mine la réputation du Canada, menace l’avenir de l’enseignement postsecondaire public au pays et, en fin de compte, nuit à la population canadienne.

Depuis janvier, et plus encore au cours des dernières semaines, nous avons insisté sur la nécessité d’élaborer des politiques mesurées et réfléchies qui aideront le Canada à atteindre ses objectifs : un système d’immigration bien géré qui continuera à appuyer l’inscription des étudiants internationaux dans des programmes qui répondent aux besoins des employeurs locaux. Malheureusement, les changements apportés au programme de permis de travail postdiplôme, tant que implémentés par Immigration, réfugiés et citoyenneté Canada (IRCC), échouent non seulement à atteindre ces objectifs, mais nuisent gravement à notre capacité à y parvenir dans le futur.

Cette mauvaise politique – ou bonne politique mal orientée – empêche ainsi le Canada de tirer parti de ses collèges et instituts publics et de leur plus grande force.

Les décideurs obligent les collèges et instituts publics à adapter leurs programmes aux besoins du marché du travail national, preuve qu’ils ne comprennent pas l’inestimable valeur des collèges et instituts pour la population canadienne et pour les employeurs à travers le pays. Les nouvelles restrictions d’admissibilité font également une fausse distinction entre la qualité et la pertinence des baccalauréats collégiaux et universitaires approuvés par leurs provinces. Pour aggraver les choses, la mise en œuvre des changements sans détails clés et avec les mauvais outils empêche vos nouveaux étudiants de prendre des décisions éclairées concernant leurs études au Canada.

Collèges et instituts Canada, c’est votre voix à Ottawa. Nous travaillons avec vous, pour vous. Notre objectif? Maximiser notre impact collectif. En l’occurrence, nous vous demandons de mobiliser vos communautés pour que leurs voix se fassent entendre à Ottawa.

Nous avons besoin de vous sur le terrain.

Il s’agit de mobiliser les chefs d’entreprise qui siègent à vos conseils d’administration et à vos comités consultatifs de programme, de vous adresser à vos partenaires communautaires et à vos municipalités, à vos députés provinciaux et fédéraux ou à vos assemblées législatives, de collaborer avec les directions de vos campus, vos étudiants et vos membres du corps professoral pour faire passer notre message.

Le Collège communautaire du Nouveau-Brunswick et le New Brunswick Community College – et non pas Ottawa – sont les mieux placés pour comprendre les besoins du Nouveau-Brunswick. La Red Deer Polytechnic – et non pas Ottawa – a tissé des liens de longue date avec les employeurs de Red Deer. Le Vancouver Community College occupe une position privilégiée pour harmoniser la formation aux besoins des entreprises de Vancouver. Le Confederation College et le Cégep de Chicoutimi comprennent et comblent mieux les besoins des régions qu’ils desservent – et non pas Ottawa.

En tant que réseau, notre force collective est notre meilleur atout pour nous mobiliser et corriger l’incompréhension d’Ottawa quant à la valeur des collèges et instituts pour la population canadienne. Une action unifiée est essentielle à un moment où vos collectivités font face à des pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs critiques, et dans un système postsecondaire où les collèges et instituts ont déjà du mal à trouver des ressources nécessaires pour servir ces mêmes communautés.

Il reste encore du temps pour corriger cette politique erronée.

IRCC doit travailler en collaboration avec les établissements, les provinces et les territoires pour élaborer un cadre où la formation de la main-d’œuvre répond aux besoins de vos communautés et où les diplômes identiques – qu’ils soient offerts par les collèges ou par les universités – soient traités de manière identique. D’ici là, les réformes politiques doivent être suspendues.

J’ai écrit récemment une lettre aux Canadiennes et Canadiens pour les encourager à nous aider : nous devons exposer à Ottawa en quoi les dommages causés aux collèges et instituts canadiens nuisent à l’ensemble de la population. Autre point crucial : montrer que votre travail est incontournable.

Construction résidentielle, personnel hospitalier, éducation de la petite enfance : les collèges et instituts fournissent une main-d’œuvre qualifiée nécessaire à de nombreux secteurs de l’économie. Un réinvestissement public dans l’enseignement postsecondaire s’avère essentiel pour notre avenir collectif.

Il ne s’agit pas là d’une question partisane. Nous sommes toutes, tous concernés. Il nous faut unir nos efforts. L’enjeu est trop important.

Cordialement, 

Pari Johnston
Présidente-directrice générale
Collèges et instituts Canada