Pour la plupart d’entre nous, trouver un colocataire avec qui l’on s’entend bien représente un soulagement, mais pour les personnes atteintes de déficience intellectuelle, cela représente potentiellement un lien vital, une occasion de mieux s’intégrer à la société. Mis sur pied conjointement par des chercheurs du Centennial College et l’organisme Community Living Toronto, le programme Friendly Housemates vise à rendre de telles occasions accessibles à un plus grand nombre de personnes.
Le concept de Friendly Housemates consiste à jumeler des personnes ayant une déficience intellectuelle et des étudiants de premier cycle dans une situation de colocation. L’étudiant obtient un logement gratuit, une bourse et un emploi d’été garanti; en échange, il aide son « sympathique colocataire » à s’intégrer davantage dans la société et à vivre de façon plus indépendante, tout en demeurant dans un milieu sécuritaire où il est protégé.
Ce projet est rendu possible grâce à une subvention du Fonds d’innovation sociale destiné aux communautés et aux collèges du Conseil de recherches en sciences humaines.
« C’est une relation de colocation aussi normale que possible », explique Marilyn Herie, chercheuse principale, dans une entrevue. « Les étudiants n’offrent pas de soins ou de soutien particuliers. Vous avez un colocataire, vous regardez la télévision ensemble, vous écoutez peut-être un peu de musique ou sirotez un café ensemble. L’idée, c’est qu’en cas d’urgence, il y ait quelqu’un d’autre à la maison », ajoute Mme Herie, qui est aussi doyenne de la formation, de l’enseignement et des programmes de bourse du Centennial College.
Les personnes atteintes de déficience intellectuelle et leurs familles craignent parfois que les foyers de groupe ne permettent pas à leurs résidents de vivre de façon aussi indépendante qu’ils le pourraient. « Les familles nous disent qu’après avoir travaillé tellement fort pour que leur enfant soit pleinement autonome, elles craignent que le foyer de groupe ne leur offre pas un cadre approprié. »
Grâce à la subvention accordée par le CRSH en 2015, les partenaires pourront poursuivre les travaux du projet pilote, qui a permis d’éclaircir ce qui fonctionnait bien et moins bien. Par exemple, en théorie, n’importe quel étudiant pourrait être un sympathique colocataire, mais, dans les faits, les familles préfèrent les étudiants en services sociaux. Cette fois, le projet ira plus en profondeur en utilisant des entrevues semi-structurées pour relever les pratiques exemplaires et les ressources nécessaires pour faire de la colocation amicale une option viable. Par la suite, il pourrait être possible de répliquer le modèle pour les personnes ayant un handicap physique, voire pour les aînés.
Le jumelage des colocataires est une affaire très délicate, car chacun a ses propres vulnérabilités. Community Living Toronto trouve de bons candidats parmi ses membres, puis assure un processus de vérification pour les étudiants qui souhaitent participer au programme. Ceux-ci doivent avoir une bonne moyenne et répondre à des questions sur leurs motivations et sur leur perception des personnes ayant une déficience. De plus, Community Living s’assure que les étudiants reçoivent une formation préparatoire générale (premiers soins, réanimation, séance d’orientation) et leur offre l’aide de conseillers, ainsi que des plages horaires où ils peuvent venir discuter de tout problème qui pourrait survenir.