Le métier d’agriculteur, autrefois transmis de père en fils, est en train de devenir un choix de mode de vie.
Traditionnellement, les fermes du Québec, comme d’autres ailleurs au pays, se transmettaient de parent à enfant, chaque génération faisant son apprentissage essentiellement en effectuant des corvées et en assumant des responsabilités croissantes avant de reprendre la direction de l’entreprise agricole. Mais cela n’est plus vrai. De plus en plus d’enfants d’agriculteurs choisissent des carrières différentes – et au Cégep de Victoriaville, au moins, une nouvelle cuvée d’agriculteurs est en cours de formation.
« Ce programme est rempli d’étudiants qui viennent de milieux non agricoles », explique Simon Dugré, directeur du Centre d’innovation sociale en agriculture au Cégep de Victoriaville. « Ils choisissent cette formation parce qu’ils veulent vivre le mode de vie d’un agriculteur. »
Cette nouvelle cuvée d’agriculteurs est une bonne nouvelle pour le Québec qui a connu une baisse constante du nombre d’entreprises agricoles (le terme utilisé par le Cégep pour toute forme d’agriculture, qu’il s’agisse de produits laitiers, de vignobles ou de légumes). C’est aussi une bonne nouvelle pour les agriculteurs qui sont prêts à prendre leur retraite, mais qui n’ont pas d’enfants souhaitant prendre la relève. Il est difficile d’abandonner toute une vie de travail consacrée à la terre, mais le risque que des mains inexpérimentées fassent péricliter l’entreprise ainsi que la perte de valeur de décennies de connaissances agricoles constituent un problème pour la société autant que pour les familles. Il est également difficile pour les jeunes, qui débutent, d’avoir les moyens d’acheter une ferme et l’équipement nécessaire à son exploitation.
De toute évidence, il était temps d’essayer de nouvelles approches pour renouveler la vie agricole. Le Fonds d’innovation sociale destiné aux communautés et aux collèges du Conseil de recherches en sciences humaines a donc accordé un financement au Cégep de Victoriaville pour mener une recherche et créer un système visant à appuyer le transfert fructueux d’entreprises agricoles à des personnes extérieures à la famille.
Dugré et son équipe élaborent un système de soutien, qui, espèrent-ils, facilitera le transfert des entreprises agricoles à des personnes extérieures à la famille et qui contribuera à la pérennité de ces nouvelles entreprises. Jusqu’à présent, les partenaires de recherche à l’Université Laval n’ont pas trouvé beaucoup de modèles dans la littérature agricole concernant leur projet, à savoir un réseau virtuel d’incubateurs au sein des entreprises agricoles. Parmi les questions importantes qu’ils abordent figurent les suivantes : comment faire pour recueillir les connaissances accumulées par un agriculteur, les transmettre, créer des « communautés de pratique » continues pour soutenir les nouveaux agriculteurs au fur et à mesure qu’ils s’installent, et comment s’adapteront-ils à cette approche?
Au cœur de leur solution se trouve un type spécial de mentors experts en reprise d’entreprises, puisqu’ils sont eux-mêmes passés par là. Ils aideront à identifier les associations adéquates entre les agriculteurs prêts à vendre et les « entrepreneurs agricoles » qui sont à la recherche d’une entreprise agricole. Ils réuniront les deux parties et leur offriront des conseils sur les défis et les décisions relatives à un transfert réussi.
« Si vous avez une bonne relation avec un nouvel agriculteur potentiel, c’est comme une adoption », explique M. Dugré. « Il s’agit de votre vie, vous voulez donc voir l’entreprise continuer et prospérer. Si vous avez la bonne personne avec laquelle bâtir cette relation, l’adoption peut avoir lieu. »