L’enseignement postsecondaire autochtone au Canada s’inscrit dans un contexte dynamique marqué par la résilience, les progrès et les défis constants. Les dernières données de Statistique Canada (StatCan), ainsi que les données du recensement de 2021, font la lumière sur cette situation. Elles soulignent le rôle essentiel joué par les collèges et instituts ainsi que la nécessité de constamment veiller à ce que ces étudiant(e)s bénéficient d’un accès équitable.
Voyons cela de plus près!
Tendances au sein de l’enseignement postsecondaire autochtone
Malgré certaines difficultés, les peuples autochtones ont accompli des progrès notables dans le domaine de l’éducation. Alors que 16 % des Autochtones sont titulaires d’un diplôme universitaire (contre 36 % pour l’ensemble de la population), 23 % ont obtenu un titre de compétences de niveau collégial et 11 % ont effectué un apprentissage. Ces chiffres dépassent ceux de l’ensemble de la population (Statistique Canada, 2021). Toutefois, si la proportion d’adultes autochtones titulaires d’un baccalauréat ou un diplôme supérieur a augmenté depuis 2016, l’écart entre les populations autochtones et non autochtones s’est creusé.
Le saviez-vous? La moitié des nouveaux inscrits autochtones dans l’enseignement postsecondaire commencent leur parcours dans des collèges, contre 37 % pour les non-autochtones (Statistique Canada, 2024). En outre, les nouveaux inscrits autochtones dans les collèges sont beaucoup plus souvent des femmes. Ils et elles ont également en général 20 ans (ou plus), ce qui diffère des nouveaux inscrits non autochtones. Ces statistiques illustrent le rôle essentiel que jouent les collèges. En effet, ils offrent des possibilités d’éducation accessibles et bienveillantes aux apprenant(e)s autochtones à tous les stades de leur vie, indépendamment de leurs conditions de vie. Non sans oublier que cela se passe dans leurs propres collectivités et que cela inclut également des services essentiels d’accompagnement.
Relever les défis : Disparités régionales et vie dans les régions éloignées
Le parcours éducatif des peuples autochtones n’est pas sans difficulté. Les injustices passées et présentes (telles que l’héritage des pensionnats et les traumatismes intergénérationnels), associées aux difficultés structurelles actuelles (accès limité aux établissements d’enseignement, insécurité alimentaire et pénurie de services de garde d’enfants pendant les études), ont longtemps jeté une ombre sur l’éducation des Autochtones.
Au sein des populations autochtones, ce sont tout particulièrement les jeunes des Premières Nations qui sont confrontés à de nombreux défis. Notons parmi ces enjeux un nombre plus élevé de jeunes parents, de ménages à faible revenu et de résidences rurales, ce qui contribue à une disparité des taux d’achèvement des études postsecondaires par rapport aux jeunes non-autochtones. En conséquence de ces défis, les jeunes non-autochtones sont près de deux fois plus à même (72 %) que les jeunes des Premières Nations (37 %) d’avoir terminé ou récemment suivi un programme d’études postsecondaires (Statistique Canada, 2023).
Pour ajouter à la complexité de la situation, les collectivités autochtones sont situées de manière disproportionnée dans les zones rurales et isolées. En 2016, ces régions abritaient 26 % des Autochtones âgés de 19 à 45 ans, contre seulement 3 % de la population non autochtone (Statistique Canada, 2023).
Comment cela se traduit-il en termes de résultats scolaires? Les personnes vivant dans des zones facilement accessibles sont nettement plus nombreuses à avoir terminé leurs études secondaires que celles vivant dans des zones très éloignées. Une analyse élargie par âge révèle également que les taux d’achèvement des études secondaires et de fréquentation de l’enseignement postsecondaire sont plus élevés chez les membres des Premières Nations vivant en dehors des zones rurales. En effet, près de la moitié des femmes et plus d’un tiers des hommes font des études postsecondaires ou sont en voie de les achever.
La proximité des établissements postsecondaires joue donc un rôle crucial dans la réussite des apprenant(e)s autochtones. Heureusement, 86 % des Autochtones vivent à moins de 50 km du campus d’un collège ou d’un centre de services. Toutefois, la proximité à elle seule ne suffit pas. Il est essentiel de proposer des options flexibles, adaptables et culturellement réactives pour combler le fossé dans l’enseignement postsecondaire et permettre aux apprenant(e)s autochtones d’atteindre leur plein potentiel. Citons à titre d’exemple les programmes de proximité, les partenariats avec les collectivités et les ressources en ligne.
Les instituts autochtones du pays, comme ceux de l’Ontario, de la Saskatchewan, de l’Alberta et de la Colombie-Britannique, ainsi que les collèges du Nord comme le Nunavut Arctic College et la Yukon University, jouent également un rôle de premier plan. Leurs emplacements, ainsi que leurs capacités et leur compréhension culturelle permettent de répondre aux besoins de la collectivité et d’offrir des programmes pertinents et accessibles qui donnent aux apprenant(e)s autochtones les moyens d’agir.
Envisager l’avenir : Donner à la jeunesse autochtone les moyens de bâtir un avenir plus solide
Le Forum des politiques publiques indique qu’environ 350 000 jeunes Autochtones atteindront l’âge adulte d’ici 2026. Renforcer les moyens d’action de ces individus en leur offrant un enseignement postsecondaire et une formation de qualité et adaptés à leur culture permettra non seulement de promouvoir l’inclusion sociale et la justice, mais aussi d’aider le Canada à remédier à son sous-emploi et à ses pénuries de compétences. On estime qu’en apportant un soutien à ces jeunes, on peut stimuler notre économie à hauteur de 27,7 milliards de dollars par an (Forum des politiques publiques, 2024).
Forts de leurs perspectives uniques, les systèmes de connaissances autochtones offrent de précieuses solutions pour aborder les enjeux pressants du Canada. De plus en plus de collèges le reconnaissent et s’impliquent dans des partenariats communautaires de recherche appliquée avec des organisations autochtones. Une telle démarche s’inscrit dans le cadre de leur engagement en faveur de l’innovation sociale et de la recherche menée pour le compte de leurs partenaires. Par exemple, au Centre for Innovation and Research in Unmanned Systems du SAIT, les chercheuses et chercheurs collaborent avec la Première Nation de Stoney Nakoda et les services de santé de l’Alberta pour mettre au point une flotte de drones évolutive. Celle-ci sera capable de prendre en charge les livraisons de produits médicaux et d’amplifier les signaux des drones dans les zones reculées.
Programmes et aides dédiés aux populations autochtones
Les collèges et instituts sont les principaux fournisseurs d’enseignement postsecondaire pour les apprenant(e)s autochtones de tout le Canada. Ils s’efforcent continuellement d’écouter, d’apprendre et de collaborer avec les peuples autochtones afin d’améliorer l’expérience éducative de leurs apprenant(e)s. Nous offrons des formats d’apprentissage flexibles et des services d’aide tels que garde d’enfants, conseils et mentorat. Ce à quoi s’ajoutent près de 300 programmes et cours centrés sur les populations autochtones dans les dix provinces et territoires du Canada.
Grâce aux programmes nationaux de CICan, dont La boussole des compétences, l’impact des collèges et instituts est également considérable. En effet, ils apportent leur soutien aux jeunes Autochtones et aux nouveaux arrivants qui ne sont actuellement ni en emploi, ni aux études, ni en formation. Cette initiative accessible aide les jeunes Autochtones à acquérir des compétences essentielles et à se préparer à la vie professionnelle. Elle met également à disposition de nos membres le Cadre curriculaire de la boussole des compétences, une ressource durable qui permet aux instituts d’adapter leurs programmes aux besoins spécifiques des jeunes Autochtones.
Les collèges et instituts aident également les apprenant(e)s autochtones à tisser des liens dans le monde entier grâce à l’initiative Expérience compétences mondiales (ECM). Cette initiative permet aux étudiantes et étudiants canadiens de l’enseignement postsecondaire d’acquérir de nouvelles compétences internationales, ce qui renforce leur résilience, leur capacité d’adaptation et leur aptitude à la réussite. Par exemple, I’M SIENT (International Mobility Supporting Indigenous Entrepreneurs), financé par ECM au Sault College en Ontario, permet aux étudiant(e)s autochtones d’améliorer leurs compétences techniques et analytiques en collaboration avec des entrepreneur(e)s autochtones de la région du Yucatan, au Mexique.
Conscients que la réconciliation autochtone est un processus évolutif, nous restons attachés à des approches sensibles à la culture. Un tel dévouement constant fait que le potentiel de changement positif et de renforcement des moyens d’action au sein des collectivités autochtones est immense.
Passer à l’action :
Les collèges et instituts peuvent faire progresser leur implication en se joignant aux 72 établissements qui ont signé le Protocole sur l’éducation des Autochtones de CICan. Élaboré en 2014, ce protocole souligne la nécessité de mettre en place des structures et des approches adaptées pour répondre aux besoins des peuples autochtones en matière d’éducation, afin de soutenir leur autodétermination et le développement socio-économique de leurs collectivités.
Pour marquer son 10e anniversaire et faire le point sur les progrès accomplis et les lacunes persistantes, CICan entreprendra une mise à jour du protocole et examinera les possibilités de mobiliser davantage ses établissements membres. Cette démarche sera entreprise lors du prochain Colloque sur l’éducation autochtone qui se tiendra à Halifax du 27 au 29 octobre et que nous organisons en partenariat avec l’Indigenous Institutes Consortium (IIC).