Imaginez ceci : les femmes qui s’efforcent de s’installer dans un nouveau pays sont équipées de caméras. Quels renseignements les photos qu’elles prendront leur fourniront-elles sur le voyage qu’elles ont entrepris? Que révéleront-elles sur le nouveau pays?
Choon Lee Chai espère que les photographies apporteront des précisions et serviront à entamer la discussion sur les programmes et les services offerts aux femmes immigrantes dans une petite ville du centre de l’Alberta. Lui et ses collègues du Red Deer College et de la University of Calgary utilisent une subvention du Fonds d’innovation sociale destiné aux communautés et aux collèges pour vérifier auprès des femmes immigrantes si ces programmes répondent à leurs besoins ainsi que les aspects qui doivent être améliorés.
Une partie de leur recherche est une technique appelée « PhotoVoice ». Cinquante femmes participant au projet, qui est financé par le Conseil de recherches en sciences humaines, vont prendre des photographies pour illustrer le rôle des services d’immigration dans leur vie quotidienne.
Le partage des photographies avec d’autres immigrants et les chercheurs permettra de révéler davantage de renseignements que ce qu’il serait possible d’obtenir avec de simples enquêtes concernant ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas au niveau des services de soutien de Red Deer destinés aux immigrantes, a expliqué en entrevue M. Chai, directeur du projet.
Les photographies ancrent la recherche dans la réalité et aident les femmes à déterminer les questions qui sont importantes pour elles. « Les photographies leur confèrent énormément de liberté pour explorer et exprimer leurs sentiments », a déclaré M. Chai. « L’un des principaux atouts de cet exercice est ce que la photographie vous rappelle des souvenirs. Elle suscite des réactions qu’une entrevue normale n’entraînerait pas. »
Les femmes immigrantes contribuent de façon importante à l’économie canadienne. Elles composent en effet environ 20 % de la population féminine totale du pays et de sa population active. Cependant, le taux de chômage des nouveaux immigrants est plus de deux fois supérieur à celui des personnes nées au Canada, même si ces immigrants sont plus susceptibles de détenir un diplôme universitaire.
La première année du projet sera consacrée à la formation d’un conseil consultatif d’immigrants composé de représentants d’organismes gouvernementaux et non gouvernementaux et de gens d’affaires. Ensuite, environ 150 femmes immigrantes seront interrogées sur les services offerts dans le centre de l’Alberta (Red Deer et les collectivités environnantes).
Le présent projet fait suite à un autre, qui a également fait l’objet d’un partenariat entre le Red Deer College et la Central Alberta Immigrant Women’s Association. Il portait sur la sécurité économique des femmes immigrantes et a révélé qu’elles sont confrontées à de nombreux obstacles. Il était toutefois nécessaire d’effectuer un suivi, d’évaluer les services destinés à ces femmes et de les adapter à leurs besoins.
« Il est préférable qu’elles jouent un rôle dans ce suivi, » dit M. Chai. « Je ne veux vraiment pas que des chercheurs aillent dans la communauté et leur disent quel est le problème. Mon approche consiste à dire « vous avez des idées, vous avez des talents, travaillons ensemble.” »
Les photographies et les histoires seront partagées dans des expositions et dans des présentations. Des groupes de discussion seront mis sur pied avec les employeurs et les autres parties prenantes et la Central Alberta Immigrant Women’s Association travaillera avec les femmes pour modifier ou créer des programmes.
« Bien sûr, il y a des obstacles structurels auxquels la société dans son ensemble doit faire face, mais je ne veux pas négliger le fait que les femmes immigrantes ont beaucoup de points forts et d’idées », a déclaré M. Chai.